le baiser

Non mais c’est quoi ça ! Non mais c’est pas possible ce truc ! Je veux du suave et du salivant, du goûtu qui dégouline moi ! Et là, j’ai quoi ? Même pas une mollusque baveuse, une limace sèche, rugueuse et raide. Moi je veux bien maîtriser mes émotions, être maître de mon véhicule, être le témoin de mes actes mais bon un peu de passion quoi ! Merde ! Pardon. On est là pour s’aimer non ? Toi le roi de la méditation, de la pleine conscience le king de l’amour inconditionnel, tu m’élèves mais tu me fais pas mouiller ! Pardon. Je suis vulgaire, je sais, je m’emporte. Mais bon, pour moi l’amour, c’est aussi de la chair, du fluide, du jus ! Faut que ça crisse un peu, que ça glisse, voire que ça pue aussi. Je suis pas faite pour l’amour éthéré moi. On est donc si différents que ça tous les deux ? Moi la punkette en colère, je commence à peine à découvrir que je respire, qu’il y a un ici et maintenant et que la compassion, putain (pardon) qu’est-ce que c’est bon ! Je tombe sur toi dans le premier ashram où j’ose aller, je tombe sous ton charme, je succombe à ta putain (j’arrête de dire pardon, j’accueille qui je suis) bon, j’en étais où, oui je succombe à ta putain d’énergie, cette sacrée aura qui tourne tout autour de toi. Elle fait pas que tourner d’ailleurs, elle te précède, on te sent arriver, on te voit venir, tu rayonnes tu sais ça ? Tu illumines, tu étoiles. Ça me change des darkeux métalleux aux cheveux dégueus. Et quand tu m’enlaces ben moi je fonds, voilà, je fonds, littéralement. Parce que c’est pas juste un hug, même pas un câlin genre je te berce, ça va aller ma fifille. Non. Tu m’élèves comme je disais et puis tu m’enveloppes dans un châle de chair tendre. Et moi je m’abandonne du coup, je suis complètement désarmée. Moi qui ai boxé n’importe qui osait lever les yeux sur moi et la main, même pour une caresse. Alors te voilà qui m’accueille dans tes bras, qui m’écoute, vraiment, profondément. Alors moi je parle, forcément, enfin. Et puis je te raconte ma life. D’abord là sous l’arbre de l’ashram et puis aujourd’hui dans ce café où on se retrouve. Et j’ai envie de te raconter plein de trucs. C’est pour ça que je t’ai appelé au retour, c’est pour ça que je te cherche, parce que tu me fais des trucs que personne ne m’a jamais fait. Enfin je veux dire, tu me fais ressentir des trucs forts tu sais. Tu me fais vibrer, je suis à fleur de peau. Pas tendue comme avant mais c’est un autre truc qui monte, plus moelleux et apaisé. Tu ouvres toutes les portes mais je comprends pas : pourquoi tu me fais pas grimper aux rideaux ?! Tu me dis que tu m’aimes, on finit par s’embrasser, mais moi quand j’aime et bien je désire ! Je mouille, tu bandes, on se roule des pelles et puis on baise quoi ! C’est pas compliqué non ? Alors ça veut dire quoi ton truc ? J’ai enfin réussi à t’embrasser mais je sens quoi là ? On parle pas la même langue ou quoi ?! Alors toi tu m’expliques que, pour toi l’amour c’est au-delà du physique, que c’est d’abord quelque chose qui nous relie, une communication d’âme à âme. Ok j’y comprends pas grand chose encore, ça fait pas 10 ans que je médite moi. Et je veux bien être patiente tout ça mais bon, un moment, c’est bien de rentrer dans le vif de la chair non ? Je veux te bouffer moi, te dévorer, qu’on se mange, qu’on soit gourmands, voraces, carnassiers même tu vois. Ouais, carnassiers du sexe. Je sais t’es végétarien, moi j’ai lâché le kebab pour du jambon-beurre c’est déjà bien non ? Enfin tu vois quoi, parce que l’amour pour moi, ça rime avec désir, c’est pas possible sinon. La beauté, on n’y accède pas que dans la contemplation, je suis désolée moi, on est des humains, on est incarnés, on a des corps bien vivants, qui sentent, qui suent, et moi j’ai besoin d’être désirée. Oui j’en ai besoin. Alors j’ai peut-être un pas à faire encore – ou plutôt un trek pieds nus yeux bandés sur le piton de la fournaise – oui donc un pas à faire encore sur le chemin de mon évolution spirituelle et tout ça. Mais voilà. C’est ça que j’avais à dire. La beauté est incarnée, elle est la chair, vraiment. Allez, je respire. 

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